Je m’Ă©tais inscrite au trail du Haut-Barr le 2 mars 2025 pour mieux dĂ©couvrir les sentiers autour de
Saverne aprÚs avoir épuisé tous les formats du trail du Petit-Ballon que je fais généralement à cette
saison. C’Ă©tait le premier dossard de l’annĂ©e et mĂȘme le premier dossard en trail depuis un an, au
Petit Ballon justement
 L’idĂ©e Ă©tait plus de faire une sortie de 30km que d’aller perfer, de toutes
façons je ne suis pas trĂšs forte, toujours en milieu/fin de peloton. J’ai donc continuĂ© de m’entraĂźner
autant que d’habitude les semaines qui ont prĂ©cĂ©dĂ©, vu que ce serait une sortie comme une autre.
Mon objectif cette annĂ©e est de finir un 110 km fin Mai et ce trail moyen du Haut-Barr s’inscrivait
bien dans la prĂ©pa. Quelques jours avant, j’ai quand mĂȘme regardĂ© le classement de l’annĂ©e derniĂšre
pour avoir une idĂ©e de ce qu’avaient fait les filles de ma catĂ©gorie, M3. Je m’Ă©tais dit qu’en y allant
cool, je le finirai en 4H30 environ, mais que si je me bottais un peu, et que j’approchais les 4H, je
serai dans les temps du podium de l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente. Mais comme j’aime bien courir, mais pas
souffrir, je ne me suis mis aucune pression, je verrai bien comment je me sentirai le jour J .
Donc l’objectif n°1 était : faire une belle sortie et prendre du plaisir.
l’objectif n°2 : si tout se passe bien, essayer de faire mieux que 4H30.
AprÚs une toute petite nuit, comme à chaque veille de course, je suis partie en vélo à la gare de
Strasbourg puis en train jusqu’Ă  Saverne, un grand confort dĂ©jĂ  de pouvoir y aller de cette maniĂšre,
plus rapide qu’en voiture et pas de stress de parking ou autre. Il faisait froid mais trĂšs beau et la
journĂ©e s’annonçait magnifique. J’ai rencontrĂ© Julie, une autre coureuse, Ă  la sortie du train, et on a
rejoint le COSEC des Dragons en papotant tranquillement de nos derniĂšres courses et de nos
enfants (on s’est connues chez la nounou qui gardait nos deux fils en mĂȘme temps). AprĂšs le retrait
des dossards, on s’est sĂ©parĂ©es car Julie prenait le dĂ©part du 13Km Ă  10H30 et mon dĂ©part Ă©tait Ă 
9H30. AprĂšs avoir dĂ©posĂ© mon sac Ă  la consigne, j’ai trottinĂ© tranquillement en montant jusqu’au
départ de la course, entouré de nombreux autres coureurs et coureuses, dans une ambiance
détendue. Je me suis mis dans la fin du peloton pour rester dans cet esprit « chill », en me disant que
j’avais de la chance d’ĂȘtre lĂ  et que j’allais passer un bon moment. J’ai pris quelques photos et j’ai
compris que le dĂ©part avait Ă©tĂ© donnĂ© quand j’ai vu les gens devant moi commencer Ă  courir, bref,
tellement dĂ©tendue que je n’ai mĂȘme pas captĂ© qu’il Ă©tait l’heure ! J’ai donc rangĂ© en hĂąte mon
téléphone et démarré ma montre, ça y est, en route. La premiÚre partie du parcours se déroule sur un
faux-plat montant et c’est parfait pour finir de s’Ă©chauffer, mĂȘme si du coup le peloton met du temps
Ă  s’Ă©tirer et que ça bouchonne lĂ©gĂšrement. Mais pas de stress, ce n’Ă©tait que le dĂ©but et j’avais le
temps. De toutes façons, je m’Ă©tais fixĂ©e de partir doucement pour ne pas me mettre dans le rouge
dĂšs le dĂ©but, comme souvent en me laissant entraĂźner par l’euphorie du dĂ©part. Ca grimpe ensuite un
peu plus jusqu’Ă  la tour du Brotsch, j’ai pris le parti de ne pas emporter de bĂątons sur cette course
pour ne pas avoir Ă  gĂ©rer « je les sors-je les range-oĂč je les mets quand je mange » etc
.donc les
jambes vont travailler seules aujourd’hui. On redescend ensuite sur le premier ravito qui est en fait
un ravitĂŽt 😉 (au bout de 7km, il arrive en effet un peu tĂŽt dans la course). Je crois que j’ai attrapĂ©
deux tucs car je n’avais rien de salĂ© dans mon sac et un morceau de banane que j’ai mangĂ©s en
continuant Ă  trottiner. Je savais par contre que le ravito suivant serait seulement dans 15km Ă 
Stambach (un ravitard? Ou ravitach ? OK, j’arrĂȘte les jeux de mots pourris
), donc qu’il fallait avoir
un peu de rĂ©serve en eau et nourriture pour la suite mais c’Ă©tait le cas. Je ne me souviens pas avec
prĂ©cision de la section centrale, la plus longue, mais c’est variĂ©, on monte, on descend, on passe par
des ruines de chĂąteau magnifiques, des falaises (je suis grimpeuse aussi alors j’ai apprĂ©ciĂ© de saluer
au passage le Brotsch, la Spille et le Geissfels
.). Je me sentais bien physiquement, mĂȘme si je
devais m’accrocher dans les montĂ©es qui sont mon point faible (je me suis promis plusieurs fois de
faire plus de renforcement des ischios et fessiers car j’Ă©tais souvent Ă  la limite de la crampe dans
toute la chaßne postérieure des jambes). Et quand je sentais un petit coup de mou mental , je
n’oubliais pas de me redire ma chance d’ĂȘtre lĂ  Ă  crapahuter dans la nature, ma chance d’avoir un
corps qui fonctionne, je pensais Ă  mes amis et ma famille qui me savaient lĂ , j’ai pensĂ© Ă  mon papa
de cƓur, Alain, qui, si il n’Ă©tait pas dĂ©cĂ©dĂ© il y a 3 ans, aurait fĂȘtĂ© son anniversaire aujourd’hui
, et
ça repartait ! Une autre chose qui m’a bien aidĂ©e est que j’avais dĂ©cidĂ© de ne pas regarder ma montre, afin de ne pas cogiter ou calculer ce qui me restait ou pas Ă  faire
 et cĂŽtĂ© cardio, me fier Ă 
mes sensations. AprĂšs le grand Geroldseck, je savais que cela descendait jusqu’Ă  Stambach, qu’on
serait Ă  21km, qu’ensuite on reprenait environ 500m de dĂ©nivelĂ© sur 2 bons kilomĂštres et que c’Ă©tait
plus ou moins fini car il ne resterait « que » la descente finale (donc si pas de bobo, plus rien de
difficile musculairement ou cardiaquement). C’est Ă  ce moment-lĂ  que j’ai commencĂ© Ă  rĂ©aliser Ă 
quel point je me sentais bien depuis le dĂ©but et Ă  penser qu’il y avait peut-ĂȘtre moyen de faire un
temps (Ă  mon humble niveau bien sĂ»r). J’ai galopĂ© dans la descente jusqu’Ă  Stambach qui m’a
semblĂ© bien longue. Mais en y arrivant, j’ai regardĂ© (la seule fois de la course) ma montre et vu que
j’Ă©tais Ă  un peu moins de 3H. A ce moment-lĂ , un bĂ©nĂ©vole m’a dit « il ne reste que 8km, c’est fini ».
Ces deux points m’ont fait basculĂ© en mode guerriĂšre. Attrapant deux nouveaux tucs et un coca
(mea culpa) au passage, je suis repartie au plus vite. J’avais pris un casque pour la musique et dĂ©cidĂ©
de l’utiliser seulement dans cette derniĂšre montĂ©e pour en faire un moment agrĂ©able malgrĂ© la
fatigue du dĂ©but de course, j’ai lancĂ© ma playlist de RilĂšs et j’ai mangĂ© ces deux kilomĂštres de
montĂ©e en tendant l’oreille vers les bip de ma montre. Lorsqu’elle a sonnĂ© la deuxiĂšme fois, j’ai su
que c’Ă©tait quasi fini et j’ai Ă©tĂ© surprise de voir « dĂ©jà » pour la deuxiĂšme fois la tour du Brotsch.
Dans les derniers kils essentiellement en descente, j’ai papotĂ© avec Alex, une coureuse trĂšs sympa
de la rĂ©gion de Niederbronn qui m’a vantĂ© le trail des Cuirassiers Ă  venir le 22 mars. Mais dans la
descente on a entendu crier derriÚre nous : une coureuse était tombée juste au-dessus, nous sommes
donc remontĂ©es l’aider. Elle avait une jambe tĂ©tanisĂ©e et saignait un peu du nez et Ă  la lĂšvre suite Ă 
la chute. AprĂšs l’avoir rassurĂ©e pendant cinq minutes, et remise sur pieds, nous sommes reparties.
Juste avant le chĂąteau du Haut-Barr, j’ai abandonnĂ© ma compagne en mettant un ultime coup
d’accĂ©lĂ©rateur car potentiellement, elle pouvait ĂȘtre de mon Ăąge et j’avais toujours en tĂȘte
d’accrocher ce podium par catĂ©gorie, ou du moins d’en ĂȘtre proche. Je n’avais pas regardĂ© ma
montre depuis Stambach mais je continuais d’y croire. Je me suis surprise moi-mĂȘme car c’Ă©tait la
premiĂšre fois de ma vie de coureuse que j’avais l’esprit de compĂ©tition
 J’ai tracĂ© dans les deux
derniers kilomĂštres, puis pestĂ© contre la malice des organisateurs qui ont placĂ© la ligne d’arrivĂ©e
dans une montĂ©e et l’ai franchie en 4H03, surprise et heureuse d’avoir atteint mes deux objectifs
sans souffrir
. j’Ă©tais sur mon petit nuage et encore une fois, presqu’Ă©tonnĂ©e que ce se soit si bien
passĂ©. Direction la consigne, les vestiaires et la douche
 et lĂ , alors que j’Ă©tais en train de
m’habiller, j’entends Ă  travers les murs, « EloĂŻse Devaux » dans le micro du speaker
 tout en
enfilant mes chaussettes et mes baskets Ă  toute vitesse pour aller voir pourquoi on m’appelle, je
cogite, premier rĂ©flexe, je me dis « Ca y est, j’ai encore perdu un truc  » Je perds souvent des
choses, surtout des choses importantes comme des clefs de voiture (coucou Caro:)) ou mon
tĂ©lĂ©phone, ma carte bancaire
. deuxiĂšme rĂ©flexe, je me dis « Et si ? Et si je l’avais ce podium  »
mais alors, comme ils ne récompensent que les premiers par catégorie, ça voudrait dire que je suis
premiĂšre M3 ? J’arrive en courant les lacets dĂ©faits et le sac ouvert devant le podium et demande,
vous avez appelĂ© EloĂŻse Devaux pourquoi ? Ben parce que vous ĂȘtes premiĂšre M3 et que vous avez
gagnĂ© quelque chose
 Je suis montĂ©e sur le podium avec la premiĂšre M5, d’ailleurs copine d’Alex
qui finit 2Ăšme M3 (j’avais vu juste;-)) et on s’est fĂ©licitĂ©es mutuellement. Pas de photo, j’ai pensĂ© un
instant sortir mon tĂ©l et en demander une mais me suis souvenue que je n’avais plus de batterie
.
tant pis pour le souvenir de mon premier et peut-ĂȘtre dernier podium en course Ă  pied, Ă  50 ans !
Je l’aurais dans la tĂȘte. Bien sĂ»r c’est totalement anecdotique, nous Ă©tions je crois cinq ou six M3 mais
malgrĂ© tout, cela m’a rendue heureuse. J’ai rĂ©ussi pour une fois Ă  bien gĂ©rer la course d’un bout Ă 
l’autre, en prenant le risque d’aller un peu plus vite que mon allure habituelle, en prenant surtout du
plaisir, sans stress nĂ©gatif, juste la pression de vouloir bien faire
 et j’ai du coup gagnĂ© bien plus
que cette place : de la fiertĂ©, de la confiance, de l’Ă©nergie positive, ainsi qu’un beau souvenir et une
expérience dont je me souviendrai lors des prochaines courses. Merci aux organisateurs de ce beau
trail et aux bĂ©nĂ©voles prĂ©sents sur la course d’avoir rendu cela possible !